Voici l’histoire véridique et hilarante d’une mère résolue à préparer un vrai de vrai gâteau pour l’anniversaire de son fils allergique aux produits laitiers et aux œufs. Attention : cuisine extrême !
Par Marie-France Piché
Je m’en souviens comme si c’était hier.
C’était en mai 2001. J’étais enceinte d’au moins sept mois de mon deuxième enfant. Grosse comme un béluga, jambes et pieds enflés, le ventre qui m’empêche de cuisiner sans me salir la devanture, les trois mentons ballottant au vent, j’avais décidé que le troisième anniversaire de mon fils Tristan se ferait autour d’un vrai gâteau avec du vrai glaçage !
Mon premier enfant est né avec de multiples allergies, entre autres aux produits laitiers et aux œufs. Méchant défi pour faire un gâteau ! Pour ses deux premiers anniversaires, nous avions célébré autour d’une très pertinente croustade aux pommes (c’est le seul dessert que je savais faire à l’époque). Cette fois-ci j’allais innover !
Gâteau ou pizza?
J’avais donc lancé des invitations à ma famille et à ma belle-famille pour un goûter matinal d’anniversaire. C’est seulement la veille de l’évènement que je me suis décidée à « popoter ». Genre vers les 20h, après la préparation du souper, la vaisselle, le bain de Tristan, l’histoire avant le dodo et les « Maman, j’ai encore envie de pipi ! » Bref, l’heure à laquelle la femme enceinte est à son meilleur et regorge de vitalité et de patience…
Je ne connaissais qu’une seule recette de pâtisserie depuis que je tentais de patauger dans ce nouveau monde des allergies alimentaires : une recette de muffin aux bananes que j’avais trouvée dans un livre poussiéreux à la bibliothèque. Je m’étais dit : « Tiens, pourquoi pas un gros muffin de fête ? »
Je me suis mise à l’œuvre en croyant bêtement qu’une recette de muffin, ça peut faire un beau gâteau bien moelleux. Premier essai : échec complet. Le fameux muffin ne s’est pas transformé en superbe gâteau de fête. On aurait peut-être pu l’utiliser pour la galette des Rois ou comme planche à découper, mais… pas comme gâteau.
Deuxième essai. Rebelote : une autre pizza !
La crise
Le béluga commençait à manquer de patience et… de bananes. J’imagine que mon mari (appelons-le Brad…) a dû faire quelques allers-retours entre la maison et l’épicerie pour me fournir en victuailles.
J’avais donc besoin d’un plan B. Il y a dix ans, le cupcake n’était pas tellement à la mode, mais je me suis dit que ce serait une bonne solution de rechange. J’ai fait une première recette puis une deuxième (ça faisait 48 muffins ça !!! Oui, oui, je sais compter… je faisais en double) mais sans succès !!! Les moules en papier étaient indécollables. Impossible de les retirer sans partir avec la moitié du muffin.
Des « dessus » de muffins… ce n’était pas ce dont j’avais rêvé pour mon petit garçon et mes invités.
Me voici donc en larmes, assise à la table de cuisine… inconsolable. Brad ne pouvait rien faire pour calmer mon affolement.
Opération sauvetage
Ding, dong ! Une fée apparaît : ma sœur qui arrive tout droit de Montréal pour assister à l’anniversaire de son filleul. Je lui raconte mes déboires. Comment vais-je pouvoir nourrir une dizaine de personnes le lendemain matin ? Elle ouvre la poubelle et y retire le seul petit muffin pas trop mal du lot. Bon, bon, je vous entends déjà : « QUOI ??? Elle l’a pris dans la poubelle ! » Mauvaise langue va… Je vous rappelle qu’il n’y avait que du gâteau dans ma poubelle.
Ma sœur range le muffin au frigo, sèche mes larmes et m’envoie me reposer tout droit dans mon lit. « Demain matin, on ira chercher des croissants et des brioches pour tout le monde et ton fils aura droit à son gâteau recouvert d’un glaçage. » Merci Titi, ma bonne fée…
Bonne fête quand même !
Le lendemain, mon Brad court chercher les croissants et tout le reste. Ma sœur Titi, de son côté, improvise un glaçage pour THE muffin.
Il faisait beau ce samedi-là et nous avions décidé de faire la fête à l’extérieur. Le soleil était au rendez-vous, j’avais retrouvé un semblant de bonne humeur, la table était mise. Il ne manquait que le gâteau devant Tristan.
On allume une bougie. Pas de place pour en mettre trois… J’entame les premières notes du BONNE FÊTEEEE… pendant que Brad tient la porte pour que j’aille rejoindre mon fils et le reste du groupe.
Petite parenthèse. Vous savez ce qu’est la relaxine ? C’est une hormone. « Pendant la grossesse la relaxine a une gamme diverse d’effets, y compris la production de collagène de ce fait augmentant l’élasticité des muscles, tendons, ligaments et tissus du canal de naissance en raison de la livraison. » Livraison, livraison… Un bébé, c’est pas de la pizza! Bref, ça fait qu’on a toujours les mains molles ou les chevilles tordues… vous voyez ou je vous amène ?
Héééé oui, en sortant de la maison, je me tords la cheville. Le reste… c’est comme dans les films. Je vois THE muffin qui plane dans les airs au ralenti et finit sa course, évidemment côté glaçage, dans l’herbe, les cailloux et le sable…
J’ai eu, pendant quelques secondes, deux envies : celle de pleurer comme un bébé et celle d’éclater de rire. C’est la deuxième qui l’a emporté. Mais là… je ne me suis pas mise à rire, mais à HURLER DE RIRE ! Un rire de folle dingue, hystérique… Je me repassais toute la saga du gros muffin… Tout ça pour finir dans le sable !!!! Ma belle-famille a sûrement cru que j’étais à enfermer ce jour-là.
Épilogue
Qu’est-ce que Tristan a mangé ? Probablement un reste de croustade… il ne s’en souvient pas. Moi, par contre, je me rappellerai toujours cette « savoureuse » histoire.
Tu vois, Marie-Josée, si ton livre [1] avait été publié plus tôt…. je n’aurais pas autant ri !!!
À propos de l’auteure :
Marie-France Piché est intervenante sociale et mère de trois enfants. Elle affronte les allergies alimentaires de son fils aîné avec beaucoup, beaucoup d’humour… et parfois une petite (mais toute petite, hein) larme.
Rédaction : mars 2012
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