Le texte qui suit est extrait du livre Déjouer les allergies alimentaires, recettes et trouvailles. Le texte original est plus étoffé et contient les références des études mentionnées.
Prévalence de l’allergie alimentaire
L’allergie alimentaire n’a rien d’un phénomène marginal. En Amérique du Nord, l’on estime que jusqu’à 8 % des enfants de moins de trois ans ont des réactions allergiques reliées aux aliments et qu’approximativement 2 % de la population adulte est touchée. Aux États-Unis seulement, l’on évalue à environ 7 millions le nombre de personnes souffrant d’allergies alimentaires. En France, une étude récente fixe à 3,2 % la prévalence des allergies alimentaires pour l’ensemble de la population. Les statistiques en cette matière sont, par ailleurs, régulièrement révisées à la hausse. D’autre part, bien que les décès attribuables à l’anaphylaxie alimentaire soient relativement rares, il semblerait que leur nombre augmente, lui aussi.
Définition et symptômes
Mais qu’est-ce que l’allergie alimentaire? Il s’agit d’une réaction disproportionnée du système immunitaire provoquée par l’exposition à une ou à plusieurs protéines d’un aliment (il peut également s’agir d’un additif alimentaire). L’ingestion d’une infime quantité de cet aliment peut suffire à provoquer une crise. Chez les personnes très sensibles, la réaction peut même survenir à la suite d’un simple contact cutané ou de l’inhalation. Les symptômes allergiques se manifestent généralement dans un délai variant de quelques secondes à deux heures après l’exposition à l’aliment déclencheur.
La réaction allergique est, en quelque sorte, le résultat d’une méprise : jugeant menaçante une substance (l’aliment) en soi inoffensive, le système immunitaire passe à l’attaque et sort l’artillerie lourde dans le but de protéger l’organisme. Cela ne se fait toutefois pas sans quelques dommages collatéraux…
Ainsi, après avoir été exposé à l’aliment au cours d’une étape que l’on appelle sensibilisation, le système immunitaire produit des anticorps [immunoglobulines E (IgE)] spécifiques à cet aliment. Ces anticorps entreront éventuellement en action à la suite d’une exposition subséquente à l’aliment et provoqueront la libération, dans l’organisme, de quantités massives d’histamine et de diverses autres substances chimiques. Ces substances déclencheront, à leur tour, toute une série de symptômes pouvant affecter les systèmes cutané, digestif, respiratoire et cardio-vasculaire.
La nature de ces symptômes tout comme leur gravité sont extrêmement variables : démangeaisons, urticaire, enflure (lèvres, yeux, langue, gorge, visage…), larmoiement, congestion nasale et écoulement, nausées, vomissements, crampes abdominales, diarrhée, altération de la voix, toux, sifflements, serrement de la gorge, difficulté à avaler, difficultés respiratoires, étourdissements, choc anaphylactique. Cette dernière réaction, qui se caractérise par une perte de conscience, peut, en l’absence de traitement, être fatale. Heureusement, elle se produit rarement.
L’évolution d’une réaction allergique est imprévisible. Il est possible qu’un seul des symptômes mentionnés précédemment se manifeste, mais il arrive également que plusieurs d’entre eux apparaissent simultanément. Par contre, il est rare qu’ils soient tous présents.
Allergie et intolérance
L’intolérance, tout comme l’allergie, peut être définie comme une réaction anormale de l’organisme à la suite de l’ingestion d’un aliment. Quoique certaines de leurs manifestations (nausées, vomissements, crampes abdominales et diarrhée) se ressemblent, il s’agit de deux phénomènes bien distincts. L’intolérance, contrairement à l’allergie, ne fait pas intervenir le système immunitaire. N’affectant que le système digestif, elle ne met pas la vie en danger. D’autre part, la sévérité des symptômes de l’intolérance est habituellement fonction de la quantité ingérée tandis que, dans le cas d’une allergie, une toute petite quantité de l’aliment en cause peut déclencher une crise.
Diagnostic
Le diagnostic d’allergie alimentaire est établi par un ou une allergologue qui s’appuie sur l’histoire de cas (d’où l’utilité de tenir un journal alimentaire dans lequel sont consignés les aliments consommés de même que toute réaction inhabituelle à ceux-ci) ainsi que sur des tests cutanés ou sanguins. Utiles, ces derniers ne sont cependant pas infaillibles et un test de provocation, effectué sous contrôle médical, peut être nécessaire pour confirmer le diagnostic.
Profil de l’allergique
Ainsi que le démontrent les statistiques citées précédemment, les enfants de moins de trois ans appartiennent au segment de la population le plus susceptible de développer une ou plusieurs allergies alimentaires. De fait, bien que pareilles allergies puissent se manifester à tout âge, elles apparaissent généralement au cours des deux premières années de vie. La majorité des jeunes enfants perdent leurs allergies avant d’avoir atteint l’âge d’aller à l’école; voilà pourquoi le pourcentage d’adultes affectés est beaucoup plus faible.
Outre l’âge, l’hérédité joue un rôle de premier plan en cette matière. Certaines personnes sont en effet génétiquement prédisposées à développer des allergies. Sont particulièrement à risque ceux et celles issus de familles ayant une histoire chargée d’allergies (alimentaires et environnementales), d’asthme et d’eczéma. Ainsi, le risque de développer des allergies, relativement faible lorsque aucun des parents n’en souffre ni n’en a souffert (10 %), augmente de façon significative lorsque l’un des parents est (ou a été) allergique (30 à 40 %) et de façon dramatique lorsque les deux parents sont (ou ont été) allergiques (80 %).
Principaux allergènes alimentaires
S’il est vrai que l’on peut être allergique à n’importe quel aliment, il reste qu’un petit nombre d’entre eux est à l’origine de la plupart des réactions. Nos habitudes alimentaires y sont apparemment pour beaucoup : les aliments consommés en grande quantité dans un pays sont en effet plus susceptibles de se retrouver sur la liste des principaux allergènes. Ainsi, l’allergie au riz est assez répandue au Japon tandis qu’en Norvège, en Suède et au Danemark, c’est le poisson qui est le plus souvent incriminé. Au Canada, l’arachide, l’œuf, le lait, les noix, la graine de sésame, le soya, le poisson, le blé, les crustacés et les mollusques sont responsables de 90 % des réactions allergiques.
Prévention de l’allergie alimentaire
Peut-on prévenir l’allergie alimentaire? À l’heure actuelle, il n’y a rien que l’on puisse faire, semble-t-il, afin d’empêcher à coup sûr son apparition. Certaines mesures peuvent cependant contribuer à réduire les risques qu’un jeune enfant développe pareilles allergies (à tout le moins ces mesures permettent-elles de retarder leur apparition). Ainsi, dans le cas de familles génétiquement prédisposées aux allergies, les allergologues recommandent généralement aux mères qui allaitent de s’abstenir de consommer certains aliments à fort potentiel allergénique (notamment les arachides et les noix). Des études ont en effet permis d’établir que certains nourrissons peuvent être sensibilisés à ces allergènes par l’allaitement maternel. On ne conseille toutefois pas aux mères de modifier leur alimentation pendant la grossesse, d’une part parce que la sensibilisation durant la grossesse n’a pas été démontrée et, d’autre part, parce que l’on craint qu’une diète trop restrictive ait une influence négative sur le développement du fœtus. Par contre, l’on incite habituellement les parents à retarder l’introduction des aliments les plus allergisants dans l’alimentation des nourrissons à risque.
Il est primordial de discuter de ces mesures de prévention avec un ou une allergologue. En outre, dans bien des cas, il est sage de s’assurer auprès d’un ou d’une diététiste que le régime alimentaire de la personne allergique répond à l’ensemble de ses besoins nutritionnels.
Traitement
Pour le moment, il n’existe pas de cure permettant de guérir de l’allergie alimentaire. L’unique façon d’empêcher de façon certaine la réaction allergique est d’éviter toute exposition à l’aliment qui déclenche celle-ci. Il faut lire soigneusement la liste des ingrédients des produits consommés, se familiariser avec les termes employés par l’industrie de l’alimentation, respecter des normes d’hygiène élevées (lavage des mains avant et après les repas, utilisation d’ustensiles qui n’ont pas été en contact avec l’allergène…), etc.
En cas d’exposition accidentelle, la prise d’un antihistaminique peut soulager les symptômes d’une réaction ne mettant pas la vie en danger. Toutefois, si la réaction est sévère, il n’y a qu’un seul traitement possible : l’administration d’une dose d’épinéphrine (adrénaline). Ce médicament, disponible dans une seringue à ressort auto-injectable (EpiPen), a notamment pour effet de dilater les bronches (ce qui réduit la difficulté respiratoire) et de contracter les vaisseaux sanguins (ce qui fait diminuer l’œdème et soulage les urticaires graves). En d’autres termes, l’épinéphrine réduit les symptômes de la réaction allergique et permet à la personne qui en est victime de continuer à respirer.
L’épinéphrine n’est pas un médicament dangereux, bien que son administration puisse entraîner quelques effets secondaires désagréables : anxiété, tremblements, palpitations et mal de tête. Convenons qu’il s’agit là d’inconvénients mineurs lorsqu’une vie est en jeu!
L’injection doit être faite très rapidement, dès l’apparition des premiers symptômes d’une réaction allergique grave. Parce que chaque minute compte, il doit toujours y avoir, à proximité de la personne allergique, une trousse d’auto-injection d’épinéphrine.
L’effet de l’épinéphrine dure de 10 à 20 minutes. Dans la plupart des cas, une seule injection suffit à enrayer la réaction. Sitôt l’injection donnée, il est impératif de se rendre à l’hôpital le plus proche. Un traitement d’appoint peut en effet s’avérer nécessaire sans compter qu’une rechute, dans les heures qui suivent la réaction initiale, est toujours possible.
Il est essentiel de discuter avec un ou une allergologue d’un plan de traitement adapté en cas de réaction. Le port d’un bracelet Medic Alert précisant la nature de l’allergie est par ailleurs recommandé.
Dernière révision : mars 2004
À propos de l’auteure :
Marie-Josée Bettez est auteure, conférencière et mère d’un enfant allergique à de multiples aliments. Webmestre du site dejouerlesallergies.com depuis 2003, elle a également rédigé deux ouvrages sur les allergies alimentaires.
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